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Interface  n° 116 Septembre 2009

● Éditorial :  Nuisances automatisées

● De l'écriture alphabétique à l'écriture électronique Interface

● Une localisation mouvante: la société des 'portables' électroniques Interface

● Exposition: Les Lettres de Saint Paul illustrées: le bilan Interface

● Mille yottas de mille sabords! Calculer les volumes de données électroniques qui s'accumulent partout sur la planète Interface

Comptes rendus:
● Bible et religion Interface
● ● Henri-Dominique Saffrey, o.p., Histoire de l'apôtre Paul, ou, Faire chrétien le monde
● ● Chantal Reynier, Saint Paul sur les routes du monde romain: Infrastructures, logistique, itinéraire
● ● Église et Communauté, Maison de la Bible, 51-52, Juin-septembre 2009
● ● Éric Denimal, Les plus belles Paroles de la Bible
● ● Bible et Musique: De Schütz à Bach, 1600-1750
● Media Interface
● ●  Guy Rainotte, Dieu, Ado-naï, Allah et moi, DVD
● ●  Dominique Yanogo, L'ère de la communication au Burkina Faso. La pastorale interpellée

News

L'évangile de Luc en langue des signes française
L'Alliance Biblique française a commencé la réalisation d'un enregistrement de la Bible pour les sourds-muets avec une équipe de personnes s'exprimant avec le langage des signes.
Plusieurs belges participent à ce travail dont le résultat sera donné sous forme d'un DVD.
On aurait pu rêver qu'avec le langage des signes ce serait une sorte d'espéranto universel qui permettrait également de dépasser les frontières linguistiques. Eh bien! non, on apprend qu'il y a un Langage des Signes Français (LSF) mais également un LSB (Langage des Signes Belge): entendez pour les francophones de Belgique (à moins qu'ici ce soit le même pour les néerlandophones?). D'où, un financement supplémentaire pour cette version adaptée à un 'dialecte' de la langue des signes!
De toute façon, on ne peut que se réjouir de telles initiatives que promeut la Société Biblique Belge (rue de Tubize, 123 – 1440 Braine-le-Château, fax: +32.2. 640.09.36

Le Dictionnaire Encyclopédique de la Bible en ligne: 15 septembre 2009! Interface
Pour la première fois accessible intégralement sous sa forme électronique (www.knowhowsphere.net ou www.biblewww.net) avec un puissant moteur de recherche, voici la 3e édition du Dictionnaire Encyclopédique de la Bible (D.E.B.), publié partiellement sous forme imprimée par Brepols en 2002.
Ce dictionnaire est 'la' référence scientifique pour le domaine biblique dans les pays francophones. Il a été réalisé, puis révisé, par les meilleurs spécialistes de chaque sous-domaine des sciences bibliques: personnages de la Bible, livres de la Bible et leur histoire, manuscrits, textes originaux, traductions anciennes et modernes, archéologie, institutions, géographie, méthodes exégétiques, chercheurs, bibliographies, etc
Une navigation multiple est possible à tout instant:
- à gauche de l'écran se trouve en permanence la Table des Matières de l'ensemble de l'ouvrage: si l'on clique sur un nœud de cette arborescence, elle se déploie et le document visé vient s'afficher dans la fenêtre centrale de l'écran.
- au centre: on a toujours le document en cours. Dans celui-ci des petites flèches rouges sont des renvois à d'autres articles complémentaires.
- à droite (et au-dessus de la partie droite de l'écran): l'Index de tous les éléments cherchables de cette énorme Base de données, c'est-à-dire: la totalité des mots (y compris ceux qui sont translittérés de langues anciennes comme l'hébreu, l'araméen, le grec, le syriaque l'éthiopien, etc), des chiffres, des abréviations que l'on peut trouver dans le Dictionnaire. Ils sont accessibles soit en recherche simple en cliquant sur un mot, soit en recherche combinée (avancée) constituée de plusieurs éléments.
Bref, une somme de science et un raffinement extrême d'outils de recherche sur ces données!
Informatique & Bible est heureux d'offrir cet outil reconnu à tous les internautes qui souhaitent trouver des informations sérieuses et critiques dans un domaine donné.

Google books: encore!
Les prises de positions et les actions face à Google dans le domaine de la numérisation des livres viennent tard et pendant que Google a déjà passé des contrats avec de grandes bibliothèques pour numériser des millions d'ouvrages. Google tente de négocier avec les consortium d'éditeurs ce qu'on appelle un 'Programme de notification' dont le principe, en droit, est stupéfiant! Google se donne le droit de numériser tous les livres qu'il veut numériser et s'attribue désormais tous les droits sur sa distribution électronique, mais il le fait savoir. Une annexion annoncée de tous les droits d'auteur! Si l'on ne veut pas qu'une production soit incluse, il faut se faire connaître à Google. On peut aussi donner son accord à Google, et l'on recevra un petit forfait pour compenser les droits d'auteur une fois pour toutes. Si on ne fait aucune action, et si l'on constate qu'une œuvre a été numérisée par Google, on peut intenter un procès à Google! Comment les juristes des deux cotés de l'Atlantique acceptent-ils ce type de captation de droits?
Par ailleurs, on se réveille bien tard comme le fait remarquer Le Canard enchaîné du 26 août 2009, p.4, en rappelant qu'à la fin des années 1980, quand on discutait de la TGB (Très Grand bibliothèque) Jacques Attali avait déjà proposé qu'on mette tout l'investissement dans une numérisation intensive et extensive plutôt que dans de l'architecture coûteuse! L'Europe également commence à s'agiter à travers son Commissaire en charge de la Société de l'Information et des Médias, Viviane Reding. Une consultation publique serait ouverte à ce sujet en vue des discussions qui doivent avoir lieu au Parlement et au Conseil européen après le 15 novembre 2009. On vente la 'Bibliothèque numérique européenne Europeana', inaugurée fin 2008. Mais on constate aussi que seulement 1% des livres des Bibliothèques nationales ont été numérisés à ce jour ... tandis que les livres électroniques (e-book) se multiplient et se rapprochent d'une utilisation visuelle proche du livre. Mais ces derniers laissent très sceptiques tous ceux qui sont 'viscéralement' formés à la civilisation du livre imprimé (voir Le Figaro Magazine, 29 mai 2009, 112-113).
Il nous faudra revenir avec un regard critique sur l'état des différentes bibliothèque numérique actuellement proposées en ligne.

Éditorial

Nuisances automatisées

Des nuisances automatisées, il y en a à peu près pour tous les sens: l'ouïe (excès des oreillettes, téléphones portables), la vue (écrans, flashy, pubs), l'odorat, le goût (cuisine moléculaire, micro-ondes), le toucher (gants pour jeux électroniques), etc.

Les héraults de la robotisation s'en réjouissent et proclament que l'être humain s'adaptera à ces nuisances exactement comme il s'est adapté, en moins d'un siècle, aux diverses nuisances générées par la civilisation de l'automobilité: odeur du pétrole et de ses dérivés, bruit des moteurs, fièvre des déplacements et de la vitesse, épuisement des énergies fossiles avec les luttes fratricides qui en sont la conséquence, bétonnage de millions de kilomètres d'espaces pour les routes au détriment de biotopes, migrations vacancières, réduction de la diversité culturelle au plus petit commun dénominateur (bien représenté par la culture des magasins d'aéroports et de stations-service, des magazines et des jeux télévisés), etc.

Si on peut discuter de la validité et de la qualité d'intégration des différentes conséquences de l'adoption généralisée de l'automobilité extensive par notre humanité, on ne peut pas nier l'importance quasiment irréversible qu'elle a acquise en un petit siècle. En sera-t-il de même pour l'adoption des dérivés de l'écriture électronique?

Dans la mesure où ces dérivés touchent directement l'usage que nous faisons de nos différents 'sens', il faut prévoir, plus que dans le cas de l'automobilité, une évolution rapide et étendue de cet usage sous une forme organique, et, donc, une évolution de la configuration de ces organes tant de façon individuelle que dans leur fonction sociale.

Pour la vue, il y a déjà longtemps que je fais le petit test, lors de conférences sur l'automatisation informatisée et la structure de l'humain, de demander à ceux qui, dans l'assemblée, portent des lunettes, de les ôter un instant et de leur demander si, avec leurs lunettes, ils sont plus intelligents ou moins intelligents que sans. Le résultat est indiscutable: sans cette prothèse mécanique (analogique) beaucoup ne se seraient pas trouvés là pour participer à une conférence!

Le prolongement d'un de nos organes par une prothèse spécifique et bien adaptée, constitue ce que nous pouvons considérer comme un progrès en humanité. Avec l'électronique, ce prolongement de l'organe peut substituer une vision totalement artificielle à notre vision naturelle ou biologique en transmettant à un cerveau (qu'il faudra bien sûr éduquer en ce sens) des signaux créés par une caméra électronique – exactement comme nous sont transmises aujourd'hui les images qui nous viennent de Mars et que nous transformons, par programmation, en images biologiquement visible sur un écran d'ordinateur.

Il suffit de transposer cet exemple aux différents 'sens' pour se rendre compte que la vision, l'ouïe, le goût, l'odorat, le toucher pourraient être affectés par le même type de robotisation. À celle-ci, il faut ajouter tous les effets complémentaires possibles d'une connexion planétaire en télécommunication électronique.

La marche vers le 'cyborg' (nom donné à cette hybridation d'humanité par tous les possibles additionnés du développement électronique) semble bien engagée à voir comment toute une génération de 'jeunes' ne peut plus vivre sans son écouteur à l'oreille (qu'il soit lié à un lecteur MP3 ou à un téléphone portable n'y change rien).

Perte ou gain en humanité? Comme en toute progression depuis l'homme de Neandertal, il y aura des pertes par atrophie ou destruction d'un organe faute d'utilisation ou par modification de fonction (cfr l'appendice ou le coccyx). Mais je suis personnellement optimiste sur cette nouvelle humanité de la 'noosphère' prophétisée par Teilhard de Chardin.

L'inconvénient est que, malgré la rapidité actuelle des mutations, la structure temporelle de développement d'une vie humaine conserve son rythme relativement lent (et court). En conséquence, on ne peut ressentir les évolutions, selon l'âge qu'on a, que comme des nuisances dues aux progrès de l'automatisation informatisée. C'est un phénomène que bien des époques avant la nôtre ont connu. Il faut donc accepter ce décalage, et tenter, autant que possible, de ne pas mourir analphabète de la nouvelle culture. On peut même tenter d'orienter certains choix; mais la marge d'action est, en fait, très réduite en ce domaine car ce sont d'énormes pressions sociales qui déterminent l'évolution et l'adoption, parfois imprévisible, de standards de telle ou telle technologie qui ne sont pas toujours les meilleurs ni les plus rationnels.

Mais on finira par mourir heureux de savoir que notre humanité peut encore progresser et se transformer pour être un jour vraiment à la hauteur de ses responsabilités originelles par rapport à notre planète et à toute la création… sans parler du Créateur lui-même! 

Fr. R.-F. Poswick, osb

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